Quand c’était…notre tour de tampon
Parcourir des rues familières, recomposer l’histoire des maisons derrière les voilages, savoir les lieux et les gens et laisser le passé se mêler au présent. Voilà la chance de ceux qui vivent là où ils ont grandi, là ou sont leurs racines. Promenade, dans le village avec Sylvie… la « fille Redou » comme on la nommait lors de son arrivée au Val de la Haye en 1969…
« Rue Henri Chivet, pour moi, elle reste la « route noire ». Nous l’appelions ainsi parce qu’elle était la seule goudronnée… neuve, lisse et… noire. Ma famille louait le rez-de chaussée de cette maison juste contre l’école. Lorsque nous sommes arrivés, j’avais 9 ans… Pour moi, le Val de la Haye, c’était le village de ma tante, je le connaissais pour y passer le Noël et le jour de l’an en famille. Lorsqu’une place s’est libérée au lamanage de Rouen, Antoine mon père a quitté son poste de marin sur un bateau pilote au havre, pour installer sa petite famille ici, toujours près de l’eau. Bretons d’origine, nous avons laissé notre cité de Caucriauville pour trouver une vraie vie de village, où chacun se connait et se sent proche des autres.
Un souvenir marquant ?
Il y en a mille… le rallye vélo, le feu de la Saint Jean animé par Bourvil, le « trou de bombe » dans la forêt où nous avons tellement joué. Mais il en est un, anodin peut-être mais toujours vivace « notre tour de tampon » instauré par Madame Calogne, notre maîtresse (CM1-CM2)*. Au moment de la récré, elle désignait l’un d’entre nous pour essuyer le tableau. Cette corvée était pour moi un plaisir, et je me revois battre le tampon sur le mur, et laisser un épais dans nuage de craie s’élever dans la pénombre du préau. Je garde une nostalgie des ces années d’école, et conserve le goût des lettres bien rondes, tracées à la craie sur le tableau noir.
Une promenade au Val de la Haye ?
Presque toujours la même, elle part de la rue de l’église… le quai jusqu’à la colonne Napoléon. Puis la remontée vers l’ancienne église, sans jamais me priver d’une pause pour admirer le jardin de Roger. (Surtout à Halloween pour y voir les citrouilles). Un arrêt au cimetière pour dire bonjour à mes parents. Puis, large coup d’œil pour embrasser la Seine et les souvenirs partagés avec mon père
Enfin, chemin des messes et la descente, par la cavée du May où était la dernière maison de mes parents, aujourd’hui habitée par ma cousine…
Partir, revenir
Lorsque j’ai quitté la maison pour prendre mon indépendance et habiter à Canteleu, je savais déjà que je reviendrai au Val. Je n’avais pas imaginé que ce serait pour y vivre avec Pascal, rencontré sur les bancs de l’école… Cela fait 14 ans que je suis revenue et je ne suis plus tout à fait sure d’en partir un jour. Un temps, notre vision était de vivre notre retraite ailleurs… au soleil… Bizarrement, plus nous avançons dans la vie, plus cette idée s’éloigne et perd de son sens
Voici « mon Val à Mo i » celui que je vois de la fenêtre de ma chambre. La forêt sur la crête, un cocon de verdure, le chant des oiseaux, les jeux des écureuils, et ce calme que j’apprécie par-dessus-tout.
L’entrée de la maison de Sylvie et Pascal Martin, rue Frédéric Bérat
Un souhait pour le village ?
J’aime mon village comme il est… avec son charme immuable mais aussi avec ses évolutions et même… ses usines. Mon souhait est de refaire vivre son esprit et cette proximité entre les gens… Ah, et puis aussi, un autre vœu très cher : recomposer la classe de CM1-CM2 de 1969 (celle de Ginette Calogne, avec qui j’ai gardé un contact), retrouver ceux qui se sont éloigné, réunir ceux qui sont restés pour, le temps d’une photo, faire revivre nos souvenirs ».
Sylvie Redou & Martine Cartier
* Ce tour de tampon existe-t-il toujours ?